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Qu'est-ce que la «Royauté sociale» du Christ?

Christ-Roi.

1) Introduction

Devrait-on mélanger la Politique et la Religion? Si oui, comment? Si non, pourquoi?

Lorsqu'on pose ce genre de questions aux «vieux de la vieille catholique», ils répondent souvent en parlant de la «Royauté sociale» du Christ, peut-être pendant qu'ils murmurent des imprécations à propos de Vatican II et qu'ils se remémorent le «bon vieux temps de Garcia Moreno». Quelle est donc cette «Royauté sociale» du Christ, et est-ce encore pertinent pour les affaires politiques d'aujourd'hui? Voici le peu que j'en ai compris.

2) Dieu ou le Diable

L'idée sous-jacente à la «Royauté sociale» du Christ est extrêmement facile à comprendre: Dieu ou le Diable. Soit que nous acceptons Dieu et que nous nous soumettons à son autorité, ou nous nous révoltons et nous disons «Non serviam!» comme Satan. Soit que nous plions le genou devant Jésus notre Seigneur [Ph 2:10], ou nous buvons une des nombreuses saveurs du Kool-Aid de l'athéisme.

Tout comme la conversion au Christ aura beaucoup d'influences positives sur notre vie, rejeter le Christ aura également de nombreux effets négatifs. Devenir chrétien (vraiment chrétien, une conversion sérieuse) provoquera par exemple:

- des effets sur la santé: éviter de se faire tatouer, arrêter de boire, arrêter de se droguer, etc.;
- des effets financiers: cesser de voler, arrêter de dépenser plus que ce qu'on gagne, obtenir un emploi, etc.;
- des effets interpersonnels: cesser de battre sa femme, cesser de raconter des mensonges, etc.;
- des effets psychologiques: «Ouille, peut-être je n'ai pas toujours raison! Peut-être que j'ai mal agi! Peut-être que je devrais réparer le tort que j'ai fait!», etc.;
- des effets politiques: voter contre les lois qui encouragent les parents à tuer leurs enfants, et les enfants à tuer leurs parents (l'avortement et l'euthanasie), demander à nos politiciens de protéger nos enfants contre les émissions de télévision pornographiques et autres influences nuisibles, organiser les parents pour mettre en place de bonnes écoles catholiques, voter pour les partis politiques qui ne favorisent pas l'une des nombreuses saveurs de athéisme, etc.

D'une certaine manière, la «Royauté sociale» du Christ n'est qu'une façon abrégée de se référer à tous les bons effets du christianisme sur la politique, en mentionnant la cause de tous ces bons effets (rejeter la royauté de tous les faux dieux).

3) Quelles sont les objections typiques à la Royauté du Christ?

Les athées ont toute une panoplie d'objections à la Royauté sociale du Christ en politique, qui sont des adaptations de la mauvaise vieille soupe aux ragots. Pour prendre une métaphore forestière, vous pourriez classifier ces objections comme ciblant soit les feuilles, soit le tronc, soit la forêt ou soit les écureuils:

3.1) Les feuilles. Cette catégorie d'objections vise les détails spécifiques de l'enseignement catholique (à savoir les «feuilles de l'arbre»). Par exemple, dans la province de Québec, de nombreux électeurs sont aussi des pervers sexuels. Donc, si vous voulez qu'ils attaquent la Royauté sociale du Christ, il suffit de mentionner les enseignements de l'Église sur l'avortement, la sodomie, la pilule, le sexe avant le mariage, etc.

3.2) Le tronc. Au lieu d'attaquer les feuilles, vous pouvez viser directement le tronc de l'arbre, dans ce cas, Dieu lui-même. Cette attaque contre Dieu peut prendre plusieurs formes, comme essayer de cacher ou d'obscurcir l'athéisme, ou de trouver une idole de remplacement politiquement correct, ou d'attaquer la possibilité, la nécessité ou la bonne approche pour penser rationnellement au sujet de Dieu, etc.

3.3) La forêt. Au-delà des «feuilles» et du «tronc» de la Royauté sociale du Christ, les attaques peuvent tourner autour de «la forêt», à savoir la coexistence avec d'autres «arbres», comme l'islam, le judaïsme, le bouddhisme, etc. Habituellement, ces attaques cachent simultanément la bonté du christianisme et le mal des autres religions (ce qui inclut le mal du pseudo-catholicisme), tout en mettant toutes les religions dans le même panier, en déclarant qu'elles sont toutes irrationnelles, et en exigeant leur égalité de traitement, etc.

3.4) Les écureuils. Supposons, pour le bien de ma métaphore, que le but d'un arbre était que les écureuils puissent y vivre heureux pour toujours. On pourrait penser qu'aucun «écureuil catholique» n'aurait d'objections contre l'arbre de la «Royauté sociale», mais malheureusement plusieurs d'entre eux en ont les bajoues pleines.

4) Au fond, comment fonctionne cette histoire de «Royauté sociale»?

Dans le bon vieux temps, vous pouviez comprendre complètement un moteur à essence sans savoir quoi que ce soit sur les ordinateurs. Vous pouviez en apprendre davantage sur les quatre cycles d'un moteur à combustion interne, démanteler totalement un moteur, mentalement suivre les molécules d'air qui passent à travers le filtre à air, se font aspirer dans le carburateur où ils sont mélangés avec de l'essence vaporisée, puis entrent dans le cylindre pendant que la soupape d'admission est maintenue ouverte par l'arbre à cames, etc.

De nos jours, plusieurs voitures n'ont pas un, mais tout un réseau d'ordinateurs qui gèrent le moteur, le système anti-pollution, le freinage ABS, même les changements de vitesse! Pour comprendre complètement une voiture (et corriger tout problème qu'elle pourrait avoir), vous devez en savoir plus que des trucs purement mécaniques, vous devez connaître les ordinateurs.

C'est un peu la même chose en politique. Si les hommes étaient des êtres purement biologiques, la politique n'aurait aucun lien avec la religion. Mais de par sa nature même, l'homme a un destin surnaturel, et puisque l'objectif de la politique est d'aider l'homme à atteindre son but, alors vous ne pouvez pas faire de la bonne politique si vous connaissez seulement la biologie. Vous avez affaire avec quelque chose de beaucoup plus compliqué que cela. (Malgré ce qu'en disent les athées.)

Thonnard résume ainsi, en quatre paragraphes denses:

§1139) 3. - Église et État. Au point de vue de la pure philosophie, le bien commun poursuivi par l'État doit être la disposition immédiate à la seule destinée légitime de l'homme qui est la gloire de Dieu, pleinement proclamée par l'amour et la contemplation dans l'autre vie: si son but immédiat est temporel, il a donc un complément éternel; et la meilleure part de ce bien commun est d'ordre religieux et moral. La société civile, sur ce plan naturel, devrait donc avoir une religion, et non seulement en garantir la pratique personnelle au citoyen, mais rendre à Dieu un culte public et social.

Mais le fait de la Révélation a modifié ces conclusions. Désormais, par la volonté explicite de Dieu, apportée sur terre par le Christ, c'est une société religieuse spéciale visible: l'Église catholique, qui est chargée de préparer les hommes à leur destinée éternelle, parce que celle-ci est surnaturelle. L'Église est donc elle aussi une société parfaite et souveraine, et elle se réserve dans le domaine de la culture, tout ce qui regarde l'ordre moral et religieux, y compris l'éducation et l'instruction, du moins pour tout ce qui touche à la vérité religieuse et à la loi morale.

Incontestablement, ce fait nouveau découronnera la société civile en confiant à un autre la part la plus noble de son idéal. Mais ce fait nouveau ne dépouille pas la société civile de sa souveraineté. L'Église et l'État sont des sociétés parfaites, chacune en leur genre. À la première revient dans le bien commun de l'humanité, tout ce qui est divin, sacré, surnaturel: la vie morale et religieuse, qui est la vie éternelle commencée dès ici-bas par la grâce. À la seconde revient tout ce qui est temporel, profane, naturel, technique ou scientifique: la vie culturelle purement humaine, artistique et littéraire, et la vie politique dont toute la perfection se réalise ici-bas.

Mais les membres des deux sociétés sont les mêmes; et il y aura donc, outre les domaines propres et indépendants, de nombreuses questions mixtes où l'entente sera nécessaire. Puisque toute société se définit par sa fin et que la fin de l'Église est supérieure à celle de l'État, c'est normalement ce dernier qui doit se soumettre et offrir ses services à la société spirituelle pour l'aider à réaliser son but, qui est au fond le même que son propre but: l'épanouissement plénier de la personne humaine. Par cette subordination spontanée, qui respecte pleinement sa souveraineté temporelle, l'État, loin de se diminuer, trouvera au contraire lui-même un puissant secours pour réaliser plus parfaitement son propre idéal.
[Source]

5) Qu'est-ce que le Magistère enseigne à propos de la Royauté sociale du Christ?

Quelques citations:

Erreur condamnée: «L'Église devrait être séparée de l'État, et l'État de l'Église.»
Syllabus des erreurs, N° 55.

Il n'est pas bien difficile d'établir quel aspect et quelle forme aura la société si la philosophie chrétienne gouverne la chose publique. L'homme est né pour vivre en société, car, ne pouvant dans l'isolement, ni se procurer ce qui est nécessaire et utile à la vie, ni acquérir la perfection de l'esprit et du coeur, la Providence l'a fait pour s'unir à ses semblables, en une société tant domestique que civile, seule capable de fournir ce qu'il faut à la perfection de l'existence.

Mais, comme nulle société ne saurait exister sans un chef suprême et qu'elle imprime à chacun une même impulsion efficace vers un but commun, il en résulte qu'une autorité est nécessaire aux hommes constitués en société pour les régir; autorité qui, aussi bien que la société, procède de la nature, et par suite a Dieu pour auteur. Il en résulte encore que le pouvoir public ne peut venir que de Dieu. Dieu seul, en effet, est le vrai et souverain Maître des choses; toutes, quelles qu'elles soient, doivent nécessairement lui être soumises et lui obéir ; de telle sorte que quiconque a le droit de commander ne tient ce droit que de Dieu, chef suprême de tous. «Tout pouvoir vient de Dieu» [Rm 13:1].
Immortale Dei, N° 3.

La société politique étant fondée sur ces principes, il est évident qu'elle doit sans faillir accomplir par un culte public les nombreux et importants devoirs qui l'unissent à Dieu. [...] les sociétés politiques ne peuvent sans crime se conduire comme si Dieu n'existait en aucune manière, ou se passer de la religion comme étrangère et inutile, ou en admettre une indifféremment selon leur bon plaisir. En honorant la Divinité, elles doivent suivre strictement les règles et le mode suivant lesquels Dieu lui-même a déclaré vouloir être honoré. Les chefs d'Etat doivent donc tenir pour saint le nom de Dieu et mettre au nombre de leurs principaux devoirs celui de favoriser la religion, de la protéger de leur bienveillance, de la couvrir de l'autorité tutélaire des lois, et ne rien statuer ou décider qui soit contraire à son intégrité.
Immortale Dei, N° 6.

Quant à décider quelle religion est la vraie, cela n'est pas difficile à quiconque voudra en juger avec prudence et sincérité. En effet, des preuves très nombreuses et éclatantes, la vérité des prophéties, la multitude des miracles, la prodigieuse célérité de la propagation de la Foi, même parmi ses ennemis et en dépit des plus grands obstacles, le témoignage des martyrs et d'autres arguments semblables prouvent clairement que la seule vraie religion est celle que Jésus-Christ a instituée Lui-même et qu'Il a donné mission à Son Église de garder et de propager.
Immortale Dei, N° 7.

Il est donc nécessaire qu'il y ait entre les deux puissances [l'Église et l'État] un système de rapports bien ordonné, non sans analogie avec celui qui, dans l'homme, constitue l'union de l'âme et du corps.
Immortale Dei, N° 14.

Relativement à la religion, penser qu'il est indifférent qu'elle ait des formes disparates et contraires équivaut simplement à n'en vouloir ni choisir, ni suivre aucune. C'est l'athéisme moins le nom.
Immortale Dei, N° 31.

[...] il est nécessaire de s'en tenir avec une adhésion inébranlable à tout ce que les Pontifes romains ont enseigné ou enseigneront [au sujet de la Royauté sociale du Christ], et, toutes les fois que les circonstances l'exigeront, d'en faire profession publique.
Immortale Dei, N° 41.

Il sera généralement utile et louable que les catholiques étendent leur action au delà des limites de ce champ trop restreint et abordent les grandes charges de l'État.
Immortale Dei, N° 44.

Qu'il faille séparer l'État de l'Église, c'est une thèse absolument fausse, une très pernicieuse erreur. [...] Et pourtant, l'ordre présent des choses qui se déroulent dans le temps se trouvant subordonné à la conquête de ce bien suprême et absolu, non seulement le pouvoir civil ne doit pas faire obstacle à cette conquête, mais il doit encore nous y aider.
Vehementer Nos, N° 3.

Les États, à leur tour, apprendront par la célébration annuelle de cette fête [du Christ-Roi] que les gouvernants et les magistrats ont l'obligation, aussi bien que les particuliers, de rendre au Christ un culte public et d'obéir à ses lois. Les chefs de la société civile se rappelleront, de leur côté, le dernier jugement, où le Christ accusera ceux qui l'ont expulsé de la vie publique, mais aussi ceux qui l'ont dédaigneusement mis de côté ou ignoré, et punira de pareils outrages par les châtiments les plus terribles; car sa dignité royale exige que l'État tout entier se règle sur les commandements de Dieu et les principes chrétiens dans l'établissement des lois, dans l'administration de la justice, dans la formation intellectuelle et morale de la jeunesse, qui doit respecter la saine doctrine et la pureté des moeurs.
Quas Primas, N° 32.

Certains prétendent que depuis Vatican II, ceci a changé. Sauf que leur prétention est fondée sur un document de Vatican II qui dit clairement:

[Ce qu'enseigne le Concile] ne porte aucun préjudice à la doctrine catholique traditionnelle au sujet du devoir moral de l'homme et des sociétés à l'égard de la vraie religion et de l'unique Église du Christ.
Dignitatis Humanae, N° 1.

Le Catéchisme de l'Église catholique reprend cette citation [CÉC, N° 2105], mais sans l'expliciter lui non plus. En d'autres mots, après Vatican II la doctrine sur le Règne sociale du Christ est officiellement inchangée, mais en pratique elle est passée sous silence (encore les péchés d'omission...).

6) Conclusion: De toute façon, je suis foutu

Est-il amusant de diffuser la doctrine de l'Église sur la Royauté sociale du Christ? Non, vous êtes soit ignoré, ridiculisé ou attaqué, y compris par une grande partie du clergé «catholique» (y compris dans ces tristes jours par le clown-en-chef lui-même).

Mais si vous ne le faites pas, il y a pire. Comme le célèbre cardinal Pie déclare: «Il [Dieu] régnera, et s'il ne règne pas par les avantages inséparables de sa présence, il régnera par des calamités inséparables de son absence.» En d'autres termes: «sans le Créateur, la créature s'évanouit» [CÉC, N° 308].

Pour les non-initiés, cela peut sembler du «charabia», comme une sorcière qui vous menace d'une «malédiction» si vous ne faites pas ce qu'elle veut. Mais c'est plutôt comme un médecin compétent qui prédit une catastrophe à un homme obèse qui fume trois paquets de cigarettes par jour et ne se se lève jamais de son canapé-TV, sauf pour aller chercher une autre bière dans le frigo. L'étude de la nature de l'homme et des sociétés vous permettra de voir les conséquences inévitables du rejet du Christ-Roi (c'est-à-dire l'athéisme), sur l'économie, la sécurité nationale, la démocratie, l'environment, la science, les droits de l'homme, le taux d'avortement, le taux de suicide, le taux de divorce, etc.

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