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J'existe, J'adore Jésus-Eucharistie!

Jésus-Eucharistie à la chapelle St-Alphonse, 2019-mars-01, vers 3h00 du matin.
Jésus-Eucharistie à la chapelle St-Alphonse,
2019-mars-01, vers 3h00 du matin.

1) Introduction

Ne vous sentez pas obligé de lire cet article, je l'écris surtout pour moi-même, pour me rappeler le bon temps que j'ai passé récemment en compagnie de Jésus, réellement et substantiellement présent sous les apparences du pain.

En temps normal, j'ai peine à surnager dans les vagues violentes de l'ici-bas. Jeté dans les rapides de la vie sans mon consentement, sans bouée de sauvetage, sans boussole, je dois nager, ou me noyer. «L'eau» dans laquelle je suis plongé, fétide et tumultueuse, n'est pas composée d'oxygène et d'hydrogène, mais plutôt de cacophonie sociale: le fleuve d'acier des automobiles polluantes et tonitruantes; les chutes assourdissantes des conversations des autres, pleines de propos avares, ou lubriques, ou calomniateurs, ou puérils, et tout ceci souvent éclaboussé de blasphèmes; les tourbillons stagnants des soucis qui tournent sans arrêt, sans espoir de sortie (comment vais-je payer mes comptes? comment soulager mes souffrances? celles de mes proches? comment faire face au lendemain? comment redresser l'injustice omniprésente? comment dénouer l'apparente absurdité du destin? etc.).

Pourtant très tôt ce matin-là, j'ai eu un coup de chance. Toutes les conditions se sont rassemblées pour m'offrir un long et beau Silence!

2) Conditions matérielles

D'abord, les conditions matérielles étaient idéales. À trois heures du matin, tout est très tranquille dans mon quartier! Quel silence profond! De plus, la chapelle est jolie. Ce n'est pas une grande beauté, mais ce n'est pas non plus une laideur post-Vatican-II (comme l'horreur paganisée à Saint-Benoît-du-Lac, qui ressemble à un entrepôt pour artefacts brisés de la Révolution Industrielle, qui attendent d'être réparés).

Non seulement le bâtiment était silencieux et beau, mais je n'avais aucun souci corporel: pas de maladie, pas d'envie d'aller aux toilettes, un bon café fraîchement derrière la cravate (et un autre de secours dans mon thermos), etc. Il y avait même à l'arrière de grandes feuilles avec de belles citations sur l'Adoration Eucharistique (de sainte Marguerite-Marie et de Saint Pierre-Julien Eymard) mais imprimées seulement d'un côté, alors j'ai pu en voler une et écrire mes idées (appuyé sur le piano droit, en arrière, qui est juste à la bonne hauteur pour servir de pupitre quand je suis debout).

3) Conditions historiques

Mes parents se sont mariés là! En fait, la chapelle Saint-Alphonse est collée sur l'église Saint-Charles-Garnier, où se sont mariés mes parents. C'est aussi dans cette église où j'ai été à la Confession pour la toute première fois. Ayant été baptisé huit jours après ma naissance, et élevé dans un milieu supposément catholique, j'avais théoriquement déjà eu les Sacrements. Mais la catéchèse du temps étaient tellement pourrie, que j'ai passé au travers de ma Confirmation, de ma Première Communion (et je suppose de ma Première Confession, même si je n'en ai aucun souvenir) sans comprendre ce qui se passait.

C'est seulement vers 18 ans, au moment où j'habitais tout près, chez mes grands-parents Rita Lebrun et Ferdinand Trudel, que j'ai retrouvé la Foi catholique. Je me souviens distinctement qu'il y avait beaucoup de bons livres dans ma chambre, comme la Bible, le «Petit Catéchisme», le Gouvernement de Soi-même, un bon vieux Missel en latin, etc. L'exemple silencieux de mes grands-parents, les bons livres, quelques vieux professeurs encore courageusement catholiques au Petit Séminaire de Québec (l'abbé Benoît Garneau, l'abbé Joffre Galarneau, M. Robert Labrie qui m'a enseigné l'amour de la philosophie), et la Grâce de Dieu, ont fait que le soir de mon anniversaire, le 25 mars 1982, tout seul dans ma chambre, j'ai mis mon plus beau complet, et j'ai recopié (du susmentionné Missel) le Credo de Nicée-Constantinople, pour ensuite signer mon nom, afin de bien montrer que j'étais dorénavant Catholique. (Oui, je m'en veux de ne pas avoir gardé cette promesse et ce Missel!)

4) Conditions ecclésiales

Comme vous devez vous en douter pour quelqu'un qui traite d'«Anti-Pape» celui que presque tous les autres appellent «Pape», je suis normalement mal à l'aise dans une église «catholique». J'enrage de voir les gens bavasser et faire tout sauf prier, même quand Jésus est dans l'Ostensoir là-devant, sur l'autel! Les manques de respect pour le Très Saint Sacrement me font bouillir le sang. J'aimerais avoir le courage de Paul Comptois, qui lorsque sa maison a pris feu (c'est environ à 5 minutes à pied d'ici), a commencé par faire sortir toute sa famille, mais qui est ensuite mort en essayant d'aller récupérer le Très Saint Sacrement qui était resté dans la chapelle.

Mais ce soir-là, tout était parfait! Il y avait nulconque! Pas de vieille dame pour ronfler durant les deux heures de mon tour de garde! (Oui, je n'invente rien). Pas de siphonnés qui viennent faire toutes sortes de prostrations et de gesticulations à l'avant, à moitié grimpés sur l'autel. Pas d'enfoirés qui bavassent entre eux à l'arrière comme s'ils étaient dans la rue ou au dépanneur en train d'acheter de la bière et des cigarettes. Et surtout, pas de prêtre «catholique» pour nous «aider» à prier en déversant un mélange de pseudo-enseignement sur l'Eucharistie (inévitablement protestantisant) et d'homélie du genre «flux de conscience», c'est-à-dire la verbalisation semi-automatique des méandres de leurs réflexions (invariablement insipides).

5) Conclusion

J'ai commencé comme à mon habitude par dire mon chapelet. Mais comme j'étais seul avec Jésus, j'ai pu le dire en marchant le long du mur côté Épitre, disant mentalement «Jésus-Eucharistie, je Vous adore!» à chaque fois que j'arrivais vis-à-vis la première rangée de bancs, et m'agenouillant de temps en temps sur un prie-Dieu pour me reposer. Je me souviens m'être dit que j'étais à ce moment un vrai Péripatéticien (du verbe «marcher» en grec), car Aristote donnait ses cours en marchant, sachant que notre esprit a besoin du corps pour bien penser. (Montaigne disait aussi: «Mes pensées dorment, si je les assis. Mon esprit ne va, si les jambes ne l'agitent».)

J'existais, mais pas seulement corporellement; j'existais vraiment, comme un esprit, avec la partie de nous qui ressemble aux anges et à Dieu, une personne avec une intelligence et une volonté libre.

Quelles conditions idéales pour penser et prier! Merci Jésus-Eucharistie! Je n'étais plus à moitié noyé, tournoyant dans les rapides du temps, mais j'étais au sec, dans un petit racoin de la Grande Barque Éternelle de Pierre, réchauffé par l'Ostensoir, respirant librement le Silence!

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